Jaguar X300, retour aux sources
L’XJ40 est un succès commercial indéniable, mais son style « carré » a banalisé le vaisseau amiral de Coventry. Chez Jaguar, on veut donc frapper un grand coup pour son restyling en faisant taire définitivement les mauvaises langues. Comme souvent, c’est en se tournant vers le passé que les designers maison vont trouver la solution.
Les grands dessins ne meurent jamais. C’est donc en s’inspirant du coup de crayon magistral de l’équipe de William Lyons – qui dessina la première XJ sur la base de la 420 – que Geoff Lawson, designer en chef de la marque anglaise, se lance sur le chemin du retour aux fondamentaux. Dehors les optiques carrées et les calandres à la suédoise. Place aux quatre phares autour desquels on a redessiné tout l’avant. Comme une étoffe fine épousant élégamment des formes féminines, la tôle a été vaguelée, telle une robe plissée, pour onduler autour des optiques. C’est magnifique. L’XJ retrouve enfin son charme. Elle est presqu’aussi belle que sa grande sœur née 40 ans plus tôt. Classique, fine et moderne à la fois. La marque anglaise fait aussi subir un joli lifting à l’arrière de son vaisseau. On réintroduit les feux en triangle qui avaient fait le succès de l’XJ6. La berline reçoit pour finir quelques améliorations en son intérieur et un nouveau nom, X300. La marque, appartenant désormais au groupe Ford, on n’a pourtant pas encore souhaité remplacer les moteurs super fiables et on retrouve encore sous le capot, le célèbre 6 cylindres AJ6 double arbres de l’XJ40 encore amélioré. Le 3,2 l passe à 219 ch, le 4,0 l à 249 ch. Le V12 est désormais un 6,0 l développant 315 ch. De l’avis de tous les spécialistes, Jaguar est au sommet de l’évolution des moteurs dont certains détracteurs racontent qu’ils sont indestructibles, principalement parce qu’ils auraient été conçu avec l’aide des ingénieurs de la marque Isuzu. Jaguar va même jusqu’à sortir en 1995 une ultime version du bloc munie d’un compresseur Eaton développant 375 ch sous l’appellation XJR ! Attention Rafale. Comme toujours chez les anglais (mais pas seulement de l’autre côté du chanel) c’est lorsqu’on a atteint l’ultime fiabilité qu’on décide parfois de couper court. Le 6 en ligne sera donc remplacé quelques mois plus tard par un V8 d’origine Ford. Mais jetons un voile pudique sur ces choix industriels stratégiques. L’X300 est un succès. Son confort et ses qualités routières font mouche.
Il s’en vendra près de 100.000 ex. L’auto reprend pourtant la cellule du XJ40 avec des modifications de carrosserie, il est vrai, fort réussies. Coté transmission, l’X300 ne bénéficie des boites automatique ZF à 5 rapports que sur ses hauts de gamme – avec l’éternelle commande en J, les célèbres J-gate, (permettant le passage manuel), mais même en ZF 4 rapports, la nouvelle berline n’est pas ridicule face à la concurrence allemande. On trouve la 3.2 l à un tarif se situant autour des 60.000 € et en version V12, elle tutoie les 100.000 euros ! C’est presque le prix de l’incroyable BMW 750i V12 qui règne sans partage sur les autobahn allemandes à une vitesse maxi volontairement limitée par le marque à 250 km/h ! En 6 ou en 12 cylindres, les moteurs jaguar 100% anglais vivent leur dernier km. Chez Ford, le nouveau propriétaire du liping cat, on fourbit déjà en secret le prochain objectif éminemment stratégique: la conquête du marché américain. Aux States, pas de salut sans V8. C’est bien connu, les ricains n’aiment pas les 6 en ligne. Alors, on va leur donner du 8 en V. Qu’importe si depuis la création de la marque c’est une première. La perfide Albion n’a jamais trop excellé dans la conception de ces blocs à la réputation onctueuse. Même Daimler avait dû s’inspirer d’un moteur Cadillac afin de créer son 2.5 l qui équipa les SP 250 et les MK2 fin 1960. Mais chez Ford on n’a bien cure des habitudes locales. Et c’est d’une feuille blanche qu’on va partir pour dessiner ce nouveau moteur tout alu. L’AJ-V8, c’est son nom, va être fabriqué dans des cylindrées allant de 3,2 L (243 ch) jusqu’à 5,0 L, et même en version suralimentée pour l’incontournable XJR (400 ch) qui bénéficiera de la transmission 5-speed Mercedes-Benz W5A580. Une boite de vitesse développée par la marque allemande pour ses AMG ! Les moteurs ne cachent pas leurs origines Ford Motor Company, puisqu’ils équiperont notamment la Lincoln LS et la Ford Thunderbird 2002-2005. On les retrouvera aussi dans plusieurs Range Rover et même à bord de l’Aston Martin V8 Vantage. On ne connaitra pas de défauts majeurs à ce V8. A part une faiblesse chronique des tendeurs de chaine de distribution qui générera quelques casses et sur certains blocs une détérioration précoce des chemises de cylindres traitées au Nikasil. L’AJ-V8 n’aura pas volé sa place dans la liste des 10 meilleurs moteurs du monde en 2000. Et la berline rebaptisée X308 portera alors fièrement son moteur américain fabriqué au pays de Galles. Un bloc efficace qui équipera également le fameux coupé XK8 dont nous reviendrons vous parler très bientôt.
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